pour monter la sphère nous avons dû emprunter l’escalier
Linéaments
Pour tendre un lien entre le discret et le continu, pour tenter de sauter d’un infini dans l’autre nous vous suggèrerons le paysage suivant.
Imaginons une toute petite île habitée par deux propriétaires qui ne peuvent s’accepter. Après règlement judiciaire il a été convenu de partager l’île en deux par une clôture. D’un bord de la mer (falaise) au bord symétrique (falaise) sera tendu une clôture faite de fils * qui devra, bien entendu, s’appuyer sur des poteaux … ( » le fameux problème des piquets et des intervalles, en sorte ? » – » oui, mais nous irons plus loin « ). Les piquets représenteront le discret et les fils le continu. Vous pourrez placer autant de piquets que vous souhaitez, il y aura toujours un intervalle ou fil entre deux piquets. Si nous laissons filer la mathaphore on pourrait imaginer que chaque piquet n’a pas d’épaisseur et que nous puissions en placer une infinité… dénombrable entre les deux bords de mer, avec cependant toujours un intervalle entre… : un tout petit bout infinitésimal de fil, bien sûr. Nous n’irons pas aussi loin dans un premier temps pour comprendre. Ne comptez pas les piquets et même si vous savez qu’il y a un piquet de plus que d’intervalle ce n’est pas là que nous voulons en venir. Pour qu’il y ait clôture ou fermeture il faut un piquet à chaque bout. Si vous ôtez l’un ou les deux piquets des extrémités la clôture sera ouverte et plus clôture par conséquent. Les fils assurent la continuité mais si vous ôtez l’une ou/et l’autre des extrémités vous avez un segment ouvert. Les deux piquets extrêmes assurent la fermeture. Les piquets intermédiaires en nombre fini ou infini ne servent qu’à accrocher le fil.
Nous nous placerons dans l’hypothèse où il n’y a pas d’autres infinis entre le dénombrable et le continu. Soit vous êtes dans le dénombrable, soit vous êtes dans le continu.
Nos piquets reliés par le fil sont dans le dénombrable , si ils étaient dans le continu…où serait le fil ? il aurait disparu et c’est un mur que vous auriez élevé et non plus une clôture !
Nous dirons que le fil aussi petit soit-il porte la puissance du continu.
Les mathématiciens ont donné un nom particulier à ce petit bout de fil : « élément différentiel », un élément aussi petit que l’on veut mais mesurable. Mesurable !!?? Ces éléments ne sont pas élastiques : ce ne sont pas du lathex **. Si vôtre clôture est bien droite et si le fil est bien tendu, vous pourrez enlever un piquet, le fil restera tendu. On pourrait dire que vous avez additionné comme avec les nombres naturels et que la mesure de l’élément différentiel obtenu ainsi aura pour mesure la somme des mesures des deux éléments d’origine. Ce qui voudrait dire que vous avez attribué à ce bout de fil ou à sa mesure une qualité de nombre … ce qu’il n’est pas à priori. Avec les piquets vous pouviez additionner … ce qui n’est en sorte que rassembler et compter.
Dans la clôture il y a un bout de fil de moins que de piquets … il suffit de compter. Les bouts de fils comme les piquets sont des objets « séparés » et on peut additionner le nombre de bout de fils comme le nombre de piquets. Si vous avez placé vos piquets de façon régulière et bien alignés, tous les bouts de fils seront identiques et si à chacun de ces bouts de fils vous lui attribuez un nombre (1 par exemple) que nous appellerons mesure ou longueur … il est possible d’additionner .
Nous voyons donc, quand tout est droit et dénombrable, qu’il est possible d’établir un « parallèle » ou isomorphisme entre (un monde fait de piquets additionnables) et (un monde fait de fils mis bout à bout).
C’est ici que nous allons faire le saut dans le continu. Rien ne nous y autorise, sauf notre imagination. Ces petits fils,(éléments différentiels) aussi petits que l’on veut ou qu’on imagine, nous leur attribuons un nombre ou mesure. Nous ne savons pas ce que cela peut encore bien pouvoir dire mais comme ce tout petit bout de fil existe nous lui collons une étiquette (comme pour nos vis et boulons dans notre étagère dans Habillage-bas(S)billage n°7) de nombre et nous additionnons ou mettons bout à bout ! Il y avait isomorphisme tant que nous étions dans le dénombrable … nous prolongeons par imagination maintenant que nous sommes dans le continu. Voilà tout … mais n’oubliez pas que tout reste encore droit ! Il faudrait nous appesantir sur la manière de définir ou construire ce nombre … pas naturel du tout***.
Imaginez que l’un des deux propriétaires remarque que la clôture n’est pas bien droite … ( il y a un piquet qui sort du rang ) et demande de corriger le tir. Que faire ? Déplacer le dit piquet, bien entendu, et le remettre dans le droit chemin. Que remarquerez-vous ? Que le fil bâille ! ( « C’est à dormir debout, votre histoire ! » – « encore heureux que nous ne vous demandions pas de faire le piquet … mais attendez la suite » ). La somme des deux mesures au sens habituel de l’addition ne convient plus. Pardi, souvenez vous de l’escalier et du semblant de paradoxe, il ne faudrait pas croire que nous soyons allés imaginer des êtres nouveaux qui seraient la copie de ce qui ne convient plus. Nous déclarerons qu’ils vérifient dans l’infinitésimal ce que le théorème de Pythagore nous permet de constater dans le macroscopique. C’est notre choix et nous sommes libres d’imaginer ce qui nous plaît. Vous pourrez bien assez tôt nous sanctionner si notre imagination n’est pas cohérente ou conforme à la réalité. D’ici là laissez vous porter par la vague.
– » Soit je veux bien patienter, mais votre Théorème de Pythagore est bien vieux, n’y aurait-il pas nécessité de le mettre au goût du jour ou de l’actualiser ? «
– » Nous allions y venir mais sachez qu’un théorème est éternel …c’est le Grand Matheur, tout puissant, qui en décide … puisque c’est lui qui pose et impose ses axiomes. Le contester est hérésie mais rien ne vous y interdit. Etant plus exigeant que vous nous irons plus loin, vous auriez pu nous rétorquer que ce fameux théorème suppose d’être dans le plan et avec un angle droit… alors que rien n’assure que l’île soit partout parfaitement plane ».
Continuons.
– » Vous ne pourriez pas attendre un peu ? Je sens venir comme un mal de mer, tout me semble tordu et flottant. Je n’imaginais pas qu’emballer des billes allait conduire à des aventures aussi périlleuses « .
– « Soit … «
suite au prochain numéro.
D’ici là reposez vous sur l’escalier et profitez en pour observer : que les marches soient grandes ou petites elles étaient formées par deux côtés d’un carré et soutenaient toujours une diagonale qui n’est qu’un morceau de la grande diagonale. Il suffit de zoomer pour s’apercevoir que rien n’a changé géométriquement. Donc quelque soit l’échelle vous avez la « même différence proportionnellement » **** entre la somme des côtés et la diagonale. Ce qu’il faut remarquer réside dans le fait que faire une marche c’est comme mettre un piquet… nous demeurons dans le dénombrable. Si vous sautez dans le continu… ce n’est plus un mur, comme dans l’exemple précédent, que vous élevez mais c’est la diagonale que vous constituez. Même différence entre clôture et mur qu’entre escalier et diagonale : deux objets de nature différente.
Notes :
* Pour notre démonstration les fils n’ont pas besoin d’être barbelés ni électrifiés.
** Pour être cohérent il nous faudrait partir des cercles vicieux … le détour serait long.
*** Pas naturel du tout puisque les grecs sous Pythagore ne pouvaient concevoir le monde autrement constitué que de nombres naturels ou fractionnaires et ne pouvaient imaginer ces nombres réels qui nous sont si familiers maintenant et permettent de concevoir la mesure. Ou réciproquement … qui est le premier de la poule ou de l’œuf ?
**** Pour être correct il faudrait dire le même rapport